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INDE, LA SPIRITUELLE

C’est sans doute l’une des choses que j’ai le plus ressenti durant mon voyage, cette présence de la spiritualité, de la religion pouvant s’incarner dans des formes extrêmement discrètes. Bien que j’ai séjourné dans le sud de l’Inde (Etat du Kérala), au bord de l’océan indien, dans des villages, au bord des côtes touristiques avec toute la cohorte d’activités commerciales, de loisirs que cela peut recouvrir, les religions, la spiritualité sont vite palpables, repérables si on y fait un peu attention. Lorsque l’on circule vers Trivandrum ou bien lorsque l’on revient vers Kovalam en longeant la côte, on repère rapidement, la succession d’églises chrétiennes en grand nombre, puis des mosquées et des temples. On observe alors cette pluralité, cette mosaïque de religions visible au travers de bâtiments assez imposants. L’Etat du Kérala se caractérise par ce que d’aucuns appellent une « oasis de cohabitation des religions ». Hindous, Chrétiens et musulmans vivent depuis des siècles en bonne harmonie et la montée du nationalisme en Inde ainsi que du fondamentalisme ne semblent pas altérer cette cohabitation, même si des incidents ont été observés plus récemment.   

Derrière cette forte visibilité des religions, ce que j’ai ressenti, ce sont des formes plus discrètes de spiritualité. Kovalam se caractérise par un dédale de petites rues bordées de murs en ciment plus ou moins esthétiques, derrière lesquels on voit, on devine, tantôt des terrains vagues jonchées de détritus, tantôt de beaux hôtels et demeures  avec des jardins luxuriants. Mais au-delà de ce qui apparaît au premier abord, il y a là, plus loin autre chose. Près de la grille d’entrée du jardin du Golden Sand hôtel, je finis, au bout de quelques jours par repérer un autel avec une petite sculpture représentant une divinité, quelques fleurs, une bougie allumée à la nuit tombante. Puis en circulant à pieds, je comprends que ces petits autels, font partie du quotidien. Et ils sont partout, au coin des rues, sur les rebords des fenêtres des maisons…Et puis il existe aussi des temples un peu cachés, où l’on peut aller se recueillir. On peut d’ailleurs entendre le matin et le soir les chants des brahmanes appelant à la prière. C’est aussi cela l’Inde, cette co-existence d’activités touristiques, commerciales, artisanales, de pêche, avec des activités plus discrètes liées à la religion ou à la spiritualité. C’est comme si cela faisait partie de la vie ; on passe ainsi de l’un à l’autre.

Le Dieu le plus vénéré et le plus présent est Ganesh. Le dieu avec la tête d’éléphant. Ganesh est le Dieu qui lève les obstacles. C’est le Dieu de la sagesse, de l’intelligence, de l’éducation et de la prudence.

Il m’a été donné l’occasion de me rendre dans plusieurs temples. Je me souviens de ce temple, situé à quelques kilomètres de Kovalam, sur les hauteurs. On y accède en touk- touk. Pas d’indications, pas de signalétique comme on le dirait chez nous. Une route chaotique, poussiéreuse. Et pourtant on finit par arriver. On peut grimper et s’installer sur la dune pour admirer le coucher du soleil sur l’océan indien et descendre ensuite dans l’enceinte du temple pour se recueillir. Ce soir, c’est un jeune brahmane qui fait l’office. Il s’enferme un moment dans l’un des petits temples, et se recueille. Puis, ensuite les portes sont ouvertes et laissent voir les offrandes, la ou les sculptures représentant la divinité, des bougies allumées, de l’encens… Doucement, presque furtivement, des gens arrivent en silence d’un peu partout et se recueillent. L’enceinte du temple domine la côte et l’océan et c’est un lieu paisible. A proximité, il y a une sorte d’ashram où sont organisés des retraites et des cours de yoga en anglais. Cet ashram est entouré de cultures et de jardins biologiques. Le temps tout autour semble s’être arrêté.

On ressent l’envie de rester.

L’autre visite aura lieu dans le temple communément appelé le temple des serpents. Il s’agit en fait de Mannarasala, un temple très ancien et internationalement connu, fréquenté par de nombreux visiteurs et pèlerins. C’est un haut lieu de vénération hindou en Inde du Sud.  Nous allons nous y rendre, un petit groupe, avec notre chauffeur de taxi indien. L’enceinte du temple est très spacieuse avec des allées permettant de circuler dans les jardins. Les gens viennent se recueillir dans le temple avec des enfants, des bébés, pour remercier de la bonne santé des enfants ou pour remercier d’avoir eu des enfants. Les femmes en quête de fertilité viennent y prier. Nous sommes les seuls occidentaux. Nous sommes curieux et attentifs et nous nous sentons également observés. Pas d’hostilité. Nous veillons à ne pas perturber la circulation des personnes, le déroulement de la cérémonie, à ne pas faire des choses qui pourraient choquer. Tout le monde est bien habillé, en habits de couleurs, des saris flamboyants pour les femmes et des « salvar kameez » (pantalon et tunique) pour les hommes. Les enfants sont maquillés et portent des bijoux. Ca sent l’encens. Tous apportent des offrandes. Des brahmanes jouent de la musique avec des instruments traditionnels, d’autres récitent des prières. Il y a des choses qui se passent à l’intérieur mais auxquelles on n’accède pas directement. C’est le brahmane qui fait le lien. A mon grand soulagement, il n’y a pas de serpents. Les seuls serpents figurent sur des sculptures et il y en a des milliers dans l’enceinte du temple et dans les jardins. Le serpent est vénéré en Inde. Il représente symboliquement la fertilité et l’immortalité mais sa place et sa signification dans la religion hindou sont bien plus complexes que cela… Ainsi, il y avait une ambiance très particulière dans ce temple. J’y ai ressenti une sorte de ferveur, une foi puissante, du mystère ! Bien que tout cela était incompréhensible pour nous, nous pouvions toutefois ressentir cette ferveur, cette foi, la puissance de ces rites. La force du sacré.  Il y avait beaucoup de monde et comme dans beaucoup de lieux de culte en Inde, tous déposent les chaussures à l’entrée. Nous avons fait de même et nous nous sommes recueillis, respectueux de ce à quoi il nous était permis d’assister, au bord de quelque chose que nous pouvions ressentir comme supérieur, nous dépassant.

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